Bye Bye « Solution à deux États »

Les frappes israéliennes sur l’Iran ont sauvé Emmanuel Macron et l'ont incité à revoir son agenda palestinien.

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Le Président Macron (site de l’Elysée)

Bassam Tayara

Les frappes israéliennes sur l’Iran ont sauvé Emmanuel Macron et l’ont incité à revoir son agenda palestinien.
Le mercredi 18 juin à New York, était fixé comme date du prétendu « processus de paix », au siège des Nations Unies. Pour le président français l’initiative, qu’il devait lancer aux côtés du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, avait comme objectif : relancer la solution à deux États.

Les bombardements israéliens sur l’Iran ont fourni à la France un prétexte pour sortir de cette l’impasse. De nombreux observateurs s’accordaient à dire que « la conférence de New York sera un terrible échec diplomatique ». L’échec a coloré cette initiative dès son origine. Bien sûr, Macron n’a consulté aucun des experts du Moyen-Orient avant de la lancé tout de go, son seul souci était dissimuler son incapacité à freiner l’agression de Netanyahu à Gaza après la rupture de l’accord de cessez-le-feu et l’utilisation de la nourriture comme arme de guerre à Gaza.

Dès son lancement, l’initiative de « solution à deux États » a été attaquée par Israël. Le ministre israélien de la Défense, Katz, s’est adressé à Macron en ces termes : « Établissez un État sur le papier, nous établissons un État sur le terrain. »faisant référence à la Cisjordanie, où le reste du territoire palestinien est rongé par les attaques des colons. L’ensemble de la classe politique en France, également était dubitatif, reflétant les interrogations au sein d’une société française divisée sur la question palestinienne.

Mais Paris a contourné ces critiques en assortissant l’initiative à de conditions que les observateurs jugent « irréalisables » : la libération des otages, l’entrée de la nourriture à Gaza, l’annonce par l’OLP de sa prise en charge administrative du Territoire, le retrait du Hamas après son désarmement, et puis l’ouverture de négociations commençant par une déclaration de reconnaissance d’Israël par les États arabes pour parvenir à une solution à deux États à long terme. Ces conditions sont présentées dans un ordre différent selon l’interlocuteur, ce qui fait rire tous les observateurs, des experts aux diplomates, en passant par les intervenants sur les chaînes de télévision, sans parler des commentaires sur les réseaux sociaux.

En effet, Paris n’a pas réussi à convaincre l’Arabie saoudite et le monde islamique d’élaborer un plan de normalisation de leurs relations diplomatiques avec Israël en échange de sa reconnaissance de l’État de Palestine. Arracher cette initiative à Riyad a été qualifié d’utopie, à une époque où le monde voit la bande de Gaza comme un champ de décombres, la famine y régnant et les bombardements israéliens restent incessants. Pendant ce temps, la carte de la Cisjordanie ressemblant à une dessin abstrait décoré par des bantoustans éparpillés et entourés par des colonies juives.

Macron pensait que la France pourrait amener le Royaume-Uni, le Japon et d’autres pays européens à reconnaître l’État de Palestine… si ces conditions étaient remplies, et par une subtilité reconnaissable chez Macron l’initiative s’est transformée en « feuille de route », proposant une formule dite « progressive » qui, selon Paris, tracerait la voie vers cette reconnaissance.

Un partisan israélien a qualifié cela d’« un ramassis d’hérésies lancées par ceux qui n’ont plus d’avenir politique », faisant référence à la fin du second mandat du président français.

Netanyahu a ignoré ce montage diplomatique, entaché par le retrait de l’Arabie saoudite et d’autres pays y compris l’Indonésie d’une part, et la guerre d’extermination qui continue allègrement à Gaza d’autre part. Et le chef du Likoud a préféré s’attaquer à son « ennemi préféré »: l’Iran.
Netanyahu était convaincu que le lancement de la première vague de missiles vers l’Iran « gèlera » cette initiative et replacera tous ceux que Macron espérait convaincre de rejoindre la « caravane de la solution à deux États », Tel-Aviv.
L’attention n’étant plus braquée sur Gaza.

Et le Président de mettre en avant le slogan « Le droit d’Israël à se défendre face à la menace existentielle que représente, selon lui, la possession d’armes nucléaires par l’Iran » (voir sa déclaration vendredi 13). Le trio qui critiquait la guerre à Gaza dénonçant la famine: la France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne s’alignèrent derrière ce slogan signifiant le danger ue représenterait l’Iran.
Bien que ces trois pays européens aient signé en 2015, aux côtés de l’Iran, de l’Union européenne, des États-Unis, de la Russie et de la Chine, l’accord visant à limiter l’expansion du programme nucléaire iranien, dont Donald Trump s’est retiré.

Maintenant on sait que Paris, Londres et Berlin avaient tenté en vain de dissuader Benyamin Netanyahu de mettre ses menaces à exécution, privilégiant la voie diplomatique. Néanmoins, dès que les trois capitales ont appris le déclenchement de la guerre, les dirigeants français, britanniques et allemands ont contacté le Premier ministre israélien pour lui exprimer leur solidarité, malgré la détérioration marquée, du moins pour les dirigeants français et britanniques, de leurs relations avec lui pendant la guerre de Gaza.

Bien que Macron a affirmé que la France « n’avait pas participé » et « n’approuvait pas cette approche ni la nécessité d’une opération militaire », et qu’il se dissocie de toute tentative de confrontation militaire, il a laissé carte blanche aux autorités israéliennes. Il a déclaré : « Lorsque j’examine les résultats de ces frappes, je constate qu’elles ont réduit les capacités d’enrichissement. Elles ont également réduit les capacités balistiques.». Il n’a toutefois pas hésité à souligner que les frappes israéliennes avaient eu « des effets conformes à la tendance souhaitée » pour empêcher l’Iran d’acquérir l’arme nucléaire, ou du moins pour entraver ces efforts.

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