MBS autorise les médias saoudiens à attaquer le Président américain
Des moqueries à l'égard de Biden encouragées par Trump et les Républicains
Bassam Tayara
Les relations entre les dirigeants saoudiens et l’administration américaine franchit un cap et connait passée à une phase de confrontation.
Cette confrontation se manifeste dans les médias saoudiens qui abondent en moquerie au sujet du président Joe Biden.
Cette vague de moqueries a été rapidement saisie par les républicains, en particulier les partisans de Donald Trump, pour intensifier leur campagne contre Biden.
Une campagne dont Mohamad bin Salman (MBS) semble l’orchestrer et tenir la baguette sachant le « degré de liberté » de la presse dans le Royaume wahhabite.
Mais la vérité ce qui se passe entre les deux pays dépasse de loin un désaccord personnel, mais il coche plutôt la case d’une divergence d’intérêts, d’enjeux et d’alliances… ce qui est historique entre ces deux alliés.
Tout au long de son histoire, les relations américano-saoudiennes n’ont pas été sans tensions : les rois saoudiens exprimaient leur agacement envers des présidents américains, mais par des canaux indirects, tels des gestes qui ébrèchent les protocoles de réception, ou bien en retardant les dates de visites programmées.
Peut-on dire qu’un point de non-retour est déjà franchi dans la relation entre MBS et Biden ? Le prince héritier saoudien étant connu pour « personnaliser » les affaires qui touchent sa politique dans une large mesure.
Mais cette fois-ci la brouille se manifeste dans le contexte d’un éloignement croissant entre les politiques des deux pays que cela soit au niveau des les intérêts, des enjeux ou bien des alliances.
La station saoudienne MBC a fait de Biden le sujet de blagues dans sa série satirique, « Studio 22 »[i], le dépeignant, dans un épisode diffusé il y a quelques jours, comme un homme sénile qui confond l’Espagne, l’Afrique et la Russie ; montrant comment la vice-présidente, Kamala Harris, est obligée de le ramener constamment sur le podium après qu’il s’en soit éloigné, de lui rappeler ce qu’il a oublié et de lui corriger les noms, ou bien de le soutenir lorsqu’il s’endort et ronfle entre une phrase et une autre ! Et pour finir par confondre Harris avec sa femme, la première dame.
L’épisode a été saisi par les médias américains de droite, plus précisément la station « Fox News », dont le célèbre présentateur, Tucker Carlson, a abordé cette moquerie, qui s’est diffusée largement aux États-Unis. Ce fut une aubaine pour la campagne républicaine en cours contre Biden. Et de nombreux républicains ont considéré cette compagne saoudienne anti-Biden comme comme la preuve de la perte d’un allié historique du fait de la politique du Président.
Des Américains, même parmi ceux qui ne soutiennent pas Biden, ont exprimé sur Twitter leur agacement face à ce qu’ils considèrent comme une insulte au président. Par contre les Saoudiens ont acclamé cette série, car ils gardent dans leurs souvenirs des décennies de moqueries américaines envers leur pays, leurs gouvernants, et les gouvernants du Golfe de façon générale décrits comme des idiots dépendants qui n’ont qu’à payer de l’argent pour protéger leurs régimes.
Donc après 80 ans de dépendance MBS se lance dans une tentative de diversification de ses relations internationales en fonction de ce qu’il croit être ses intérêts. MBS apparaît comme s’il désir élargir la palette de ces relations avec d’autres pays, ainsi que les ventes de pétrole ou les achats d’armes, etc..
Cependant, un examen minutieux indique que MBS n’a pas quitté la case de la dépendance et d’alliance avec Washington car il a toujours besoin d’un soutien politique et des armes qu’il ne peut obtenir que des Américains… mais pas de Biden.
Il se confirme, jour après jour, que les relations entre MBS et Biden s’inscrivent dans un contexte de méfiance sinon d’antipathie « politico-personnelle ».
De plus, on peut dire que les républicains aux États-Unis encouragent le prince héritier saoudien : , à l’approche des élections de mi-mandat aux États-Unis en novembre prochain MBS partie de la campagne des Républicains contre le Démocrate Biden.
Il est fort probable que le prince héritier, sans le soutien des Républicains, ainsi qu’une frange des Israéliens, n’aurait pas osé de telles actions dans le mépris du président américain.
La politique suivant les intérêts de chaque partie il n’est pas utile de rappeler, que celui qui s’est le plus moqué des Saoudiens, et du roi Salmane et de MBS, est … Donald Trump, qui a qualifié leur pays de « vache à lait », et a n’a pas hésité à dire qu’il a sauvé les « fesses » de MBS dans le cas du journaliste « découpé dans le consulat saoudien » Jamal Khashoggi.
Pour Trump, l’Arabie n’a que de l’argent, et c’est la raison pour laquelle il « aime » le roi, et a reçu MBS souriant dans le bureau ovale, et réussit à le persuader d’acheter pour 450 milliards de dollars d’armes américains ?!
Mais les insultes saoudiennes à l’égard du président américain ont suscité une mobilisation des Démocrates, qui ont dénoncé l’inaction de Biden envers l’Arabie saoudite, contrairement à ses promesses électorales, tandis que des membres de la Chambre des représentants ont envoyé une lettre au secrétaire d’État Anthony Blinken, signée par plus de 20 députés, et publiée par le site Internet « Intercept », et ont réclamé des informations sur l’évaluation par l’administration des relations saoudi- américaines.
La lettre révèle indirectement l’existence d’un examen approfondi sans précédent des relations, effectué par l’administration et non rendue publique.
Cela fait suite au refus du « le gouvernement saoudien de coopérer avec le gouvernement américain après l’invasion russe de l’Ukraine et la crise qui s’en est suivie. »
Des sénateurs écrivent : Plutôt que de répondre aux appels de notre gouvernement à augmenter la production de pétrole, qui aurait immédiatement fait baisser les prix du pétrole, l’Arabie saoudite a choisi d’engager des pourparlers avec Pékin pour discuter de la tarification en yuan d’une partie de ses ventes de pétrole à la Chine, une mesure qui affaiblirait le dollar.
La lettre aborde d’autres préoccupations, notamment la poursuite par l’Arabie saoudite de l’appropriation d’une technologie nucléaire indépendante en réponse à l’avancement des négociations des six avec l’Iran.
De même les Démocrates ne cessent de rappeler l’absence de responsabilité dans l’affaire du meurtre de Khashoggi, de l’attaque contre le Yémen, et la répression des citoyens saoudiens et l’absence de tout progrès sur l’égalité des sexes et les droits des travailleurs.
[i] « Studio 22 » : Producteur et acteur principal de la série, Khaled Al-Farraj.