Les cryptomonnaies se développent à la faveur des crises

23000 monnaies virtuelles circulent sur les réseaux

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Bassam Tayara

N’est-il pas étonnant que les cryptomonnaies restent à l’ombre des crises qui secouent le monde actuellement?
La guerre que la Russie mène en Ukraine, la tentative de coup d’État de Wagner, les tensions entre la Chine et les États-Unis, la dégradation des conditions climatiques et toutes ses conséquences occupent les devant de la scène médiatique… mais on en parle très peu des cryptomonnaies. Pourquoi?
A regarder de près les pays occidentaux ne favorisent nullement le développement de cette monnaie numérique pourtant promise avant une ou deux décennies à devenir le moteur de l’économie mondiale.
La crainte de l’Occident est que les cryptomonnaies aident les pays sous sanctions à contourner ces sanctions. Également le fait qu’on cherche de plus en plus, dans les pays du Sud une alternative au dollar en tant que monnaie des échanges et de … refuge, fait que Washington ne trouve absolument plus des avantages à favoriser les cryptomonnaies et les alliés des Américains sont dans la même posture, surtout l’Union européenne pour préserver l’euro. Tout système de paiement indépendant du dollar devient incontrôlable et de là il déstabilise le système d’hégémonie financière et monétaire de cet Occident.
Et cela débordera sur la politique de façon générale, et sur les capacités de l’Occident à imposer des … sanctions économiques.
Pour comprendre cette nouvelle architecture monétaire il faut jeter un coup d’oeil sur les bases qui ont régi l’utilisation et les échanges des monnaies.
Chaque monnaie a sa référence juridique et institutionnelle: Par exemple, le dollar américain est référencé par la Réserve fédérale américaine, l’euro l’est par la Banque centrale européenne tandis que le yuan est référencé par la Banque populaire de Chine, et ainsi de suite pour toute les autres devises.
Quant aux monnaies cryptées, ce sont des nœuds dispersés géographiquement et connectés par le biais d’Internet, d’où leur existence et leur circulation, c’est exactement, comme dans le cas des monnaies émises par banques centrales de différents pays, sauf que dans ce cas c’est un très grand nombre… d’émetteurs de programmes qui constituent des noeuds!
A la fin de ce mois de juin (le 28/06/2023, par exemple) le nombre de nœuds ou d’ordinateurs au sens concret connectés au réseau Bitcoin, l’une des crypto-monnaies les plus échangées, a atteint 44704 ports virtuels ou ordinateurs, chacun avec une adresse Internet ou une adresse IP distincte. Le nombre de ces nœuds augmente quotidiennement à mesure que la crypto-monnaie gagne en circulation soit pour toute transaction entre deux ordinateurs (celui qui paie et celui qui encaisse).
Aujourd’hui, selon le magazine américain « Forbes » du 15/03/2023, il existe environ 23000 types de cryptomonnaies, avec une valeur commerciale totale de 1100 milliards (12 rangs de 0) basée sur presque 23000 « devises privées».
Cette somme monumentale « d’argent » n’est pas soumise à une gestion centrale et devrait constamment se multiplier en nombre, en capital et en utilisateurs (acheteurs, vendeurs et transactions).
Ces 23000 programmes informatiques (ou jeux électroniques, si on ose l’analogie), dont beaucoup ont été conçus à partir de modèles prêts à l’emploi écrits en « C++ » , ‘lun des langages de programmation informatique les plus populaires.
Ces programmes/jeux produisent de l’argent virtuel qui menace le monopole des banques centrales mondiales sur l’argent. Cela touche des transactions quotidiennes et l’ampleur de sa propagation, affecte dès lors les commissions des intermédiaires, des banques privées, des compagnies d’assurance, le tourisme, les voyages et autres, et ainsi, il sape fonctionnellement le sens de existence de la monnaie réelle.

A titre d’exemple-on peut comprendre pourquoi la Russie continue à « commercer, vendre et acheter » malgré les sanctions.
Donc les États-Unis peuvent, édicter des lois et des sanctions sur le commerce en dollars, l’Union européenne quand c’est en euros etc… Mais personne ne peut, en théorie, empêcher le commerce d’une cryptomonnaie parce qu’elle tire sa légitimité des forces de l’offre et de la demande, qui se font sur les réseaux numériques et non par le biais d’une banque centrale ou commerciales.
Il est probable que l’institutionnalisation de la cryptomonnaie deviendra de plus en plus difficile avec la nouvelle donne politico-économique qui divise le monde en plusieurs pôles qui sont en conflit.
L’ère du déclin de l’unipolaire, l’érosion de l’hégémonie américaine dans les mondes réel ne sont pas dus à la montée en puissance de la Chine mais à la diffusion d’une monnaie virtuelle qui échappe à tout contrôle.

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