Liban: Des élections en vue le 15 mai 2022

Le Hezbollah entouré de deux alliés inconciliables se trouve dans une situation délicate

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Beyrouth – Hamed Dabbous

Le président libanais, Michel Aoun, a signé mercredi 29 le décret de convocation du collège électoral, dans la perspective des élections législatives prévues le 15 mai 2022. La date des élections est désormais officiellement fixée et ne pourra plus être changée sauf forces majeurs… expression qui pour le Liban plongé dans une crise historique ne signifie plus grand-chose.

Les Libanais éliront les 128 députés le dimanche 15 mai, date en forme de concession faite par le Premier ministre Najib Mikati à Aoun. Quant aux Libanais de l’étranger, ils se rendront aux urnes le vendredi 6 ou le dimanche 8 mai (selon les jours de week-end dans leur pays de résidence). Ils devront choisir leurs députés parmi les candidats en lice dans les 15 circonscriptions du pays, et non pas six députés qui formeraient une 16ème circonscription qui leur est dédiée, comme le voulaient le président et surtout son gendre le puissant chef du Courant Patriotique Libre (CPL, fondé par M. Aoun).

C’est l’omni-président du parlement Nabih Berri, chef du mouvement Amal deuxième composante du chiisme politique libanais qui a fait capoter la création d’une 16ème circonscription, qui aurait pu profiter au CPL. Pour ce , il a fait voter par deux fois la même loi (qui reprenait les 15 circonscriptions) qui était refusée par le Président Aoun une première fois, ce qui a rendu son refus de signature caduc comme le prévoit la Constitution.

La situation met en porte-à-faux le puissant Hezbollah car ces deux partis (Amal et le CPL) sont ses alliés !

Le duel Berri- Bassil date du lendemain de l’élection de Aoun à la présidence. Suite aux pressions de son allié le Hezbollah, Berri accepta, après presque deux ans de blocage, de « faire participer ses députés au vote » et ainsi atteindre le quorum pour l’élection. On rapporte que juste après que Aoun prêta serment Berri dit à son entourage, on a élu un président et non pas deux, faisant allusion à l’ombre du gendre omniprésent derrière le général de 83 ans.

Et depuis les relations entre ces alliés du Hezbollah ressemblaient à des braises sous les cendres.

Le dernier accro c’est l’affaire dite du juge Tariq al-Bitar, qui enquête sur les responsabilités engagées après l’explosion du port de Beyrouth. Parmi les personnes convoquées pour l’enquête il y avait l’ex-premier ministre Hassan Diab et trois ministres dont un très proche de Berri. Ce dernier défendait les prérogatives du parlement, et  ne l’entendait pas de cette oreille, prétendant que seul le parlement pouvait juger des ministres et accusait le juge de partialité ayant convoqué des ministres d’un seul bord politique.

Berri et avec lui le Hezbollah réclamèrent le dessaisissement du Juge et pour forcer la main du Président et du Premier ministre Mikati, tous les ministres chiites boycottent le conseil des ministres donc pas de gouvernement -pour respecter la parité confessionnelle- depuis maintenant presque deux mois.

Pendant ce temps, le Hezbollah agissait comme médiateur entre Berri et Bassil, et s’est efforcé de trouver une solution ! Parmi les solutions proposées figurait un « troc » qui reposait sur des « concessions mutuelles » : donner à Bassil ce qu’il voulait au Conseil constitutionnel en ce qui concerne le vote des expatriés, et le CPL garantisserait le vote de ses députés afin de défalquer le procès des présidents et des ministres de l’instruction judiciaire en cours ce qui se traduit par un dessaisissement camouflé du juge. Et dans le paquet de ce troc un jeu de chaises musicales entre les juges de diverses juridictions, des propositions qui ne convenaient à aucune partie.

Déjà sachant que les Français, les Américains, et la communauté internationale soutiennent le juge al-Bitar, Mikati refusa de convoquer un conseil des ministres qui devait entériner ce troc et mettre en route les réformes réclamées par la Banque Mondiale et les donateurs la France en premier lieu.

Donc retour au point de départ, et le Hezbollah se trouve entre ses deux alliés inconciliables qui se préparent à de très mauvais coups lors de ces élections à venir.

(Prochain article : Les autres alliés du Hezbollah)

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